Une Ivoirienne qui a vécu une vingtaine d’années en France, a décidé d’écouter les appels incessants des nouvelles autorités installées depuis avril 2011, afin de venir investir dans ce pays. Mal lui en a pris.
Fiers Ivoiriens, la patrie vous appelle!
Dès son premier voyage en Europe après son investiture, le président Ouattara a invité les Ivoiriens de la diaspora à venir investir dans leur pays.
Appel entendu par dame Kouassi qui se rend immédiatement à l’Ambassade de Côte d’Ivoire en France pour avoir plus d’informations sur les nouvelles possibilités d’investissement en Côte d’Ivoire. Là, elle échange avec Sylvestre Assoumou, conseiller technique de l’ex-ministre chargé des PME, de la diaspora et des investisseurs étrangers, Sidiki Konaté. Et, également représentant de l’Institut ivoirien de l’entreprise (Inie).
Dame Kouassi est donc accompagnée par ce dernier pour mener à bien son projet qui est de s’installer et créer une structure de BTP en Côte d’Ivoire. Mais laissons Sylvestre Assoumou nous édifier sur son rôle : «Il faut dire pour l'instant, pour nous, ministère des PME et de l'Artisanat, depuis deux mois, le ministère a activé l'Institut Ivoirien de l'Entreprise (INIE), a affecté un représentant de cette structure ici en France auprès de moi pour pouvoir étudier, suivre et accompagner les Ivoiriens de la diaspora dans la réalisation de leurs projets. Il faut dire qu'il y a un programme qui a été créé spécialement pour les Ivoiriens de l'étranger qui est le Programme d'Appui et d'Accompagnement à la Création pour les Ivoiriens de l'Etranger en Petite et Moyenne Entreprises (PACIE-PME). Ce programme a plusieurs volets. Voir comment faciliter la création d'entreprise, comment étudier un projet pour avoir un financement, et après comment suivre la progression de ce projet dans sa réalisation sur place. C'est le travail de l'INIE qui a un représentant ici en la personne de M. Diabagaté Yacouba. Nous sommes à la disposition des Ivoiriens à tout moment à l'annexe de l'ambassade de Côte d'Ivoire…D'ailleurs, en ce qui concerne les difficultés rencontrées par nos compatriotes de l'étranger, une solution a été trouvée. C'est-à-dire bientôt, il y aura un guichet unique du ministère qui va englober tous les services pour la diaspora. Ce qui va faciliter la création d'entreprises et créer les conditions favorables pour la réalisation des projets. C'est ce que le ministre Sidiki Konaté demande…Nous avons un président qui compte beaucoup sur la diaspora….» («Le Banco.net», 27/4/2012).
C’est beau, c’est grand ! Sauf que la suite sera moins responsable !
Après plusieurs échanges, Sylvestre Assoumou impose à dame Kouassi, pour le montage de son projet et au motif de respecter la procédure, un transitaire (MO Fret) qui est censé être accrédité par le ministère des PME. Dame Kouassi se laisse convaincre, et verse 15.000 Euros, soit près de 10 millions FCFA.
Après ce premier versement, la brave dame verse à nouveau 8.000 Euros (5,248 millions FCFA) contre reçu, portant le timbre de l’ex ministère de l’Artisanat et de la Promotion des PME-PMI. Selon Sylvestre Assoumou, ces frais permettront à l’Etat de couvrir l’ensemble des impenses relatifs au transit et au dédouanement des équipements. Lesquels sont des actifs constitués sur fonds propres et d’une valeur de 90,5 millions FCFA ayant permis d’acheter un ensemble porte char, deux camions, un compacteur, une traceuse de ligne blanche, et un véhicule militaire.
Sur la base de ce discours et après les versements, dame Kouassi débarque à Abidjan.
La désillusion!
A Abidjan, dame Kouassi a pu créer son entreprise de BTP. Mais voilà 14 mois qu’elle ne peut démarrer ses activités. Motif ? Tout le matériel importé reste bloqué à la douane. C’est que l’armateur prétend que le transitaire présenté par Sylvestre Assoumou n’a rien payé.
En réalité, tous les versements faits à Paris ont été détournés et n’ont servi à rien. Dame Kouassi est donc invitée à s’acquitter de frais de magasinage qui s’élèvent à plusieurs millions. Cela, bien que l’Etat ait accepté d’annuler les frais relevant de ses services. En effet, le ministre du Commerce, de l’Artisanat et de la Promotion des PME, Jean Louis Billon, a pu permettre à dame Kouassi de bénéficier de certaines exonérations au niveau du port, de la douane, de l’Oic….après avoir saisi sa collègue de l’Economie et des Finances Kaba Nialé.
Mais ces exonérations n’ont pas réglé son problème. Malgré ses plaintes à l’Inie et au ministère, Sylvestre Assoumou n’a pas encore été inquiété.
L’Inie, la police économique et l’Ige floués par Assoumou!
En février 2013, au cours d’une rencontre à l’Inie, dame Kouassi se rend compte qu’elle a été victime d’une escroquerie de la part de Sylvestre Assoumou. Lequel a usé de faux documents portant le timbre de l’ex ministère de Sidiki Konaté. Préjudice subi ? 15 millions de Fcfa !
En avril 2013, une plainte est portée à la police économique contre Sylvestre Assoumou pour escroquerie, faux et usage de faux. Mais l’homme court toujours.
Finalement, l’affaire arrive à l’Inspection Générale d’Etat. Le 20 août 2013, l’IGE se prononce. A «l’issue des échanges, et dans le souci d’assurer la réparation des dommages causés à la société Cirobat, il a été convenu que le ministère du Commerce, de l’Artisanat et la Promotion des PME et l’Inie accélèrent les démarches auprès du ministère chargé de l’Economie et des Finances (Direction générale de la Douane) afin de permettre à cette PME d’entrer, dans les meilleurs délais en possession de ses machines. Un moratoire en vue d’un allègement et d’un paiement différé des différents droits et taxes devra, à cet effet, être arrêté».
Mais il ne se passera rien !
Tiens, revoilà Sylvestre Assoumou !
Entre-temps, pris de remords ( ?), Sylvestre Assoumou envoyait des mails à dame Kouassi. Le lundi 25/3/2013, il écrit à 16 heures 5 mn: «Bonjour, je vous ai demandé de bien vouloir me faire le point de ce que vous m’avez versé pour qu’on vous rembourse.»
Un deuxième suivra le lendemain, à 13 heures 05 mn: «Moi j’ai une copie des montants et votre argent est toujours bloqué encore sur le compte inie Europe. C’est à vous de me dire moi j’ai les pièces à Paris; détaillez moi les montants pour que je puisse demander votre virement, je dois être dans les 6000 Euros, ce que j’ai pris et donné un reçu.»
Le 28/5/2013, il reviendra à la charge avec une histoire à dormir débout: «Bonjour Mme, je veux que vous entriez en contact avec moi pour que je puisse vous restituer ce que vous avez payé parce que je suis venu en France pour voir comment fermer le compte de l’Inie que j’ai ouvert pour vous restituer votre argent, et j’ai duré parce que la fermeture d’un compte prend beaucoup de temps et pour qu’on te restitue tous les sous que tu as déposés on me demande d’attendre 45 jours. Une chose que vous devriez savoir est que je ne vous ai pas escroquée ni pensé vous soutirer de l’argent. J’allais pouvoir vous sortir vos machines même si on ne me l’a pas demandé de le faire, mais j’ai déjà fait ça pour d’autres sinon j’ai travaillé sur 350 dossiers j’ai aidé beaucoup de personnes dans ce sens. Sinon j’allais avoir au moins 100 personnes qui allaient venir se plaindre mais sur 350 dossiers il y a combien qui me reprochent cela, pourtant d’autres ont payé des sommes et j’ai effectué des démarches qui se sont bien passées. La seule chose que je vous reproche est que j’avais déjà commencé à faire les démarches et vous avez commencé à aller voir tout le monde pour me traiter de tous les noms. Une fois que vous avez appris par Amandine que je n’avais pas le droit et j’ai pris votre argent, vous auriez dû me faire appel et avoir une discussion avec moi, pour me dire ce que vous avez appris et j’allais vous expliquer et vous démontrer et vous demander de me laisser le temps de sortir vos machines et j’allais les faire sortir avec mes contacts à la Douane. On a commencé une affaire, si vous apprenez autre chose appelez moi et demandez ou cherchez à savoir pour que je vous donne des explications. Sincèrement pour vous dire j’ai mal de voir que vos machines sont bloquées pourtant j’avais les moyens et les contacts pour les faire sortir surtout que j’avais déjà le premier bon de livraison (bl) avec moi (…) »
Un autre mail le 26/10/2013, «Je viens vers vous pour qu’on trouve une solution. Encore une fois, je n’ai pas dépensé vos sous. Vous ne m’avez pas laissé travailler sinon j’allais sortir vos machines. J’ai rencontré le transitaire, on a discuté pour voir comment on peut vous aider à récupérer vos machines. Je peux voir avec lui, payer ce que vous devez et récupérer vos biens, et Abidjan essayez aussi de vous aider. J’ai rendez-vous avec le transitaire lundi, j’attends votre retour. Et je vous présente mes excuses pour ces désagréments mais je veux qu’on trouve une solution rapidement.»
Mais ce héros ne fera rien du tout !
Le porte char sorti, les autres matériels toujours bloqués
Le 22 janvier 2014, dame Kouassi est quand même parvenue à faire sortir son ensemble porte char. Mais les deux camions, son Grader, son compacteur, sa traceuse, et son véhicule militaire restent bloqués. Les 90 millions investis l’ont été en pure perte ! Plus les 15 millions que Sylvestre Assoumou rembourse dans chaque mail mais qui ne sont jamais disponibles.
Les frais de magasinage continuent de grimper chaque jour.
La nouvelle direction de l’Inie ne semble pas très chaude pour lui porter secours ! Dame Kouassi a donc tout perdu.
Voilà qui devrait motiver d’autres Ivoiriens de la diaspora à tenter l’aventure dans leur pays !
Source : L’ELEPHANT DECHAINE N°254