Son humilité frise la timidité. Et pourtant, ce n'est pas le savoir, la connaissance et l'éducation qui font défaut à cet homme. Dr. Lénissongui Coulibaly, puisque c'est de lui
qu'il s'agit, est un sachant tant par sa formation universitaire que par la conviction avec laquelle il milite au PDCI-RDA. Maire de Boundiali pendant 15 ans, directeur de cabinet de feu le
ministre Jean Baptiste Mockey, Lenissongui Coulibaly a côtoyé pendant de longues années le Président Houphouët. Aujourd'hui, aux côtés du Président Bédié, l'homme sait de quoi il parle quand il
s'agit du PDCI-RDA. Politologue de formation, il jette le regard du scientifique sur la crise que vit la Côte d'Ivoire. Au passage, il ne se prive pas de jeter la pierre dans le jardin de ceux
qui adorent le clinquant et pensent que faire de la politique, c'est dénigrer les autres. Lisez plutôt !
Docteur, au PDCI, quand on prononce votre nom, LENISSONGUI COULBALY, automatiquement, on voit le Directeur de cabinet du Président BEDIE. Vos rapports avec l'homme…
Je vous remercie de l'occasion que vous m'offrez de pouvoir, à travers "Le Repère" qui renaît, présenter mes vœux les meilleurs de bonne et heureuse année 2008, non seulement à vos lecteurs, mais également à ceux de "Le Nouveau Réveil" dont je suis le Président du Comité d'Eveil, aux militants et sympathisants du PDCI-RDA et aux Ivoiriens dans leur ensemble. Je prie le TOUT-PUISSANT pour qu'il jette un regard compatissant sur notre pays et le fasse enfin sortir de cette situation que seuls des cyniques peuvent envier.
Revenant à la question que vous posez, je suis, en effet, le Directeur de cabinet du Président du PDCI-RDA, S.E.M. le Président HENRI KONAN BEDIE. J'ai été nommé à ce poste après le 11ème Congrès et précisément le 15 juin 2002. Il est donc normal que les militants voient en moi le Directeur de cabinet du Président BEDIE puisque tel est le cas.
Mes rapports avec le Président sont d'abord des rapports de patron à collaborateur. Mais, je dois préciser qu'ils sont empreints d'une très grande cordialité. Ces rapports étaient déjà très forts du temps de son exil. Ils sont devenus familiaux au fil du temps. Le Président m'assure de sa protection discrète et paternelle. En un mot, je suis et reste attaché à sa personne.
Directeur de cabinet, votre récompense de n'avoir pas été choisi Secrétaire général du PDCI-RDA ?
Je crois que c'est au Président lui-même que la question doit être posée, puisque c'est lui qui nomme à tous les postes. Il faut considérer le Président comme un général à la tête d'une armée. Il dispose de soldats qu'il connaît. ll sait par conséquent où positionner tel ou tel de ses soldats pour obtenir le résultat qu'il veut obtenir. Il sait donc pour quelles raisons il m'a nommé au poste de Directeur de cabinet plutôt qu'à celui de Secrétaire général.
En quoi consiste concrètement votre rôle ? N'est-ce pas un titre ronflant pour la forme ?
J'ai occupé à plusieurs reprises, le poste de Directeur de Cabinet, dans ma carrière de fonctionnaire. Je rappelle que j'ai été le directeur de Cabinet de feu Jean Baptiste MOCKEY jusqu'à sa tragique disparition en 1981. J'ai servi d'autres dans les mêmes fonctions. Je n'ai jamais eu l'impression qu'il s'agissait d'un titre ronflant sans contenu. Mais peut -être pour les jeunes, et à titre didactique, faut-il indiquer que le Directeur de Cabinet est le collaborateur direct du ministre ou du Président dans le cas d'espèce. Il est au courant de toutes les affaires concernant le département et prépare les dossiers pour le patron. Il reçoit le courrier qu'il impute à différents services pour traitement et souvent, dépendant de la complicité qui existe entre lui et son patron, il traite directement certaines affaires dont il rend compte. Il est par ailleurs le conseiller en chef de son patron. On pourrait dire que le Directeur de Cabinet sert de courroie de transmission entre le patron et le public, pour ceux, naturellement qui n'ont pas accès directement à lui.
A partir de ces indications, vous voyez qu'il ne s'agit pas d'un poste sans contenu, d'un titre ronflant, pour satisfaire quelqu'un.
Mais je considère cela du reste comme une insulte, de penser que le président puisse nommer un cadre dans le simple but de lui faire plaisir.
Certes, le Directeur de Cabinet n'est pas au-devant de la scène, ce qui semble le plus souvent intéresser les gens, mais il ne constitue pas moins une pièce importante dans le dispositif de tout ministère ou de toute structure. Je sais, pour ma part, que malgré les apparences, j'apporte dans le poste que j'occupe, le meilleur de moi-même. Beaucoup ignorent mes déplacements à Daoukro, lorsque le président a besoin de moi à ses côtés ou alors qu'il a besoin de quelque chose de précis.
Il est vrai, je le répète, que nos compatriotes aiment le clinquant et le " m'as-tu vu ", mais il faut souvent se méfier des apparences.
Gnamien Yao trouve votre poste immérité allant jusqu'à vous traiter de judas après le renversement du Président BEDIE…
Je suis surpris par ces propos de M.Gnamien Yao. S'il estime que je ne mérite pas ce poste, c'est peut-être lui qui le mériterait ! Je ne comprends pas cette propension qu'a ce monsieur de s'en prendre à tout le monde. Il estime également que je serais un Judas. Je suis sûr qu'il ne sait pas qui était Judas, car il n'a certainement jamais lu la Bible, pire, il n'a sans doute jamais mis les pieds dans une église. Je suis chrétien pratiquant et c'est pourquoi, je ne puis accepter d'être traité de Judas.
Peut-il me dire qui j'ai trahi ? Qui ai-je livré pour quelques pièces d'argent ? Là, quand même, je crois qu'il exagère et je ne puis permettre cette méchanceté qui ne peut se justifier. Je suis indigné. Pourquoi ces attaques gratuites ?
Je dois reconnaître que lorsque le Président, en exil, m'a demandé d'être son porte-parole, j'ai eu à faire face aux méchancetés, à la jalousie et à la délation à l'intérieur du PDCI. Beaucoup n'ont jamais accepté que je joue ce rôle. Selon eux, je n'étais pas de son sérail : j'étais un étranger. Je dois vous avouer que ce fut difficile pour moi d'avoir à faire face au CNSP et me battre contre mes partisans. C'était une gymnastique périlleuse. Dieu merci, le Président est revenu, nous avons réussi notre mission.
Je voudrais dire à M.Gnamien Yao que mon mariage avec une fille du canton Zédi de la sous-préfecture de Bayota et qui est une proche parente du Chef de l'Etat est une porte ouverte pour moi, pour être à ses côtés, car les Bété, dans leur culture, ont pour habitude de " gâter " leurs beaux-frères. Mais, je suis un homme de conviction, un homme de parole ; c'est pourquoi, je n'ai jamais trahi ma ligne politique.
Je dois vous avouer que la dignité coûte cher, elle n'a pas de prix pour un enseignant à la retraite comme moi. Je suis senoufo, et chez moi, on nous enseigne l'honneur.
M. Gnamien Yao, qui se targue d'avoir, tout seul, fait revenir le Président BEDIE d'exil, n'était pas seul dans l'arène en ce temps-là. Pour lui rafraîchir la mémoire, je vais citer ceux des jeunes, et non des moindres, qui se sont battus eux aussi et qui pourtant sont restés discrets. Ce sont: le Mouvement Nouvelle Génération de Kouadio Konan Bertin (KKB), le Mouvement des Femmes actives (MOFAC) de Célestine ZOMA, le Mouvement de Soutien aux Actions du PDCI-RDA (MOSAC) de KONATE Idriss, le Mouvement Paix et Réconciliation nationale d'AMANKOU Jean Michel, le HKB Je Positive de Mea ETTIEN, le Comité national de Soutien à la Candidature de HKB d'Ibra BAKHOUM, le C.R.B de TANOH Assielou Félix, le S.N.F.B de TANOH Marthe, la Jeunesse Féminine en Action de YAPO Valérie, l'A.S.P.R.E.N.A de Madame AKPOUE Yvette, et bien entendu, FUTURIV-PDCI que j'ai créé avec des amis et que je continue de diriger. Comment apprécier l'apport respectif de chacun de ces groupes de soutien qui furent actifs, sauf à dire qu'ils ont tous contribué au retour effectif d'exil du Président Henri KONAN BEDIE!
A ces groupes de jeunes, il convient d'ajouter Denis KAH ZION et son "Réveil", devenu plus tard, "Le Nouveau Réveil" grâce à qui nos messages et nos meetings étaient largement diffusés sur toute l'étendue du territoire national.
Il y avait aussi des militants, des hommes et des femmes qui ont souhaité garder l'anonymat, et qui n'étaient pas moins actifs et que nous ne cesserons jamais de remercier.
Il y avait également ces hommes et ces dames qui certainement se reconnaissent dans ces écrits et qui venaient spontanément nous aider !
Je dois rappeler à M.Gnamien YAO que j'ai pris sur moi de faire la déclaration du 26 décembre 1999 au nom du PDCI-RDA pour dire que le PDCI prenait acte du coup d'Etat de Robert GUEI et redonner de la sorte, au lendemain du putsch, courage aux militants qui étaient tous troublés et désorientés.
Par ailleurs, je tiens à rappeler à Gnamien Yao et aussi à vos lecteurs qu'après avoir fait la déclaration dont il a été fait mention plus haut, j'ai pris également le risque, alors que certains militants par peur ou par méchanceté, n'osaient prononcer le nom du Président BEDIE, de me présenter sur le plateau de la Télévision ivoirienne , Première Chaîne et de proclamer haut et fort, à l'émission "Quatre vingt dix minutes pour convaincre", ma foi dans le retour triomphal d’Henri KONAN BEDIE. L'animateur de l'émission était Thomas BAHINCHI et trois autres journalistes dont Abel DOUALY de Fraternité-Matin, Franck DALY de "Notre Voie" et Charles SANGA de “Le Patriote”. C'était le jeudi 26 avril 2001.
Monsieur Gnamien Yao a raison quand il clame partout avoir refait le Président tout seul. N'a-t-il pas été nommé ministre alors que tous les autres jeunes qui ont donné leur poitrine n'arrivent pas à satisfaire un seul de leurs besoins ? Il devrait avoir honte de raconter n'importe quoi. Quand on est rassasié parce que on a tout eu et que les autres ont les mains vides, on devrait se taire par pudeur
J'ai ouï dire qu'il a été nommé ambassadeur et qu'il serait allé faire une école de diplomatie en France. J'en suis très étonné, car la diplomatie française est l'une des meilleures au monde. Y-a-t-il vraiment suivi ces cours ? J'en doute fort.
Dans le cas contraire, le Chef de l'Etat devrait regarder par deux fois avant de nommer ce genre de personne. On ne doit pas confier la diplomatie d'un pays à une "pie". La pie fait partie d'une espèce d'oiseau que l'on qualifie de rapporteuse, de voleuse et de bavarde. Elle ne sait ni se taire, ni garder un secret. Je crois pour ma part que M. Gnamien Yao devra prendre attache avec nos éminents diplomates de carrière pour avoir quelques conseils sur l'éthique et la déontologie du diplomate. C'est ce comportement fait de dignité, de réserve et de pondération qui leur donne cet air grave et respectable qu'on leur envie tant.
Enfin, que me reproche-t-on au juste? Je n'ai pas appris à casser les poux sur la tête des autres. Je n'aime pas les coups bas, les peaux de banane et les intrigues, non, ce n'est pas moi et je ne changerai pas pour un sou, car la politique, pour moi, ce n'est pas cela.
Je parle quand il faut parler. Je ne parle donc pas au hasard. Je ne cherche pas non plus à être au-devant de la scène quand cela n'est pas nécessaire. Peut-être, est-ce pour cela que j'observe, depuis quelque temps, que beaucoup d'intervenants dans les meetings omettent de me citer parmi ceux qui ont apporté leur concours et participé au combat qu'il fallait mener à cette époque ?
J'indiquerai également que tous ces jeunes, hommes et femmes, qui se battaient, n'avaient souvent pour seul lieu de réunion que ma modeste villa où j'avais dû faire ériger, dans la précipitation, un appatam pour servir de lieu de rencontre car, les locaux de la maison du PDCI leur étaient interdits.
Enfin, j'indiquerai que lorsqu'il s'est agi, parce que le Président BEDIE l'avait demandé, de fédérer ces groupes, seul le mouvement de Gnamien YAO s'est montré réfractaire !
L'occasion est belle, n'est-ce pas Dr, de nous parler de ce " Comité de crise ", dirigé par le ministre Jean KONAN BANNY.
Depuis le retour triomphal du Président d'exil, j'observe les mouvements des uns et des autres et c'est une leçon de choses sur le comportement des hommes. Bien des gens, connus et reconnus, ont posé des actes indignes pendant la période du coup d'Etat et de la transition, et, toute honte bue, se présentent comme ceux-là mêmes qui ont tout mis en œuvre pour le retour de notre président.
Comme il semble y avoir confusion, je vais vous dire ce que je sais de cette période.
Rappelons que le 22 décembre 1999, le Président a prononcé à l'Assemblée nationale, un discours très nationaliste qui a reçu l'approbation de tous. Toute la salle s'est levée comme un seul homme pour l'acclamer, une " standing ovation ", diraient les anglo-saxons.
Et le Président s'est rendu par la suite à Daoukro pour les fêtes de fin d'année.
Dès le 24 décembre, on assistait, par-ci, par-là, à l'intrusion des " jeunes gens ", qui ont érigé des barrages aux différents carrefours, jusqu'à la déclaration du général Robert GUEI disant qu'il avait mis fin au pouvoir du Président BEDIE.
Les partis de l'opposition d'alors ont commencé à envoyer à la radio, des déclarations de soutien et c'est dans la soirée du 25 décembre 1999 que mon aîné IPAUD LAGO m'a demandé d'intervenir au nom du PDCI. Je lui ai dit que je ne pouvais le faire étant donné que dans la hiérarchie du parti, je ne venais qu'en troisième ou quatrième position. Il m'a dit qu'il fallait le faire puisqu'en apparence on ne me reprochait rien, étant donné que je ne vivais que sur mon salaire de fonctionnaire. Par ailleurs, en ma qualité de Secrétaire national chargé des sections et des délégations départementales et communales, j'étais responsable des délégués et des secrétaires de sections. On sait que Fologo était à AKOUEDO et que lui IPAUD LAGO était indisponible. C'est donc ainsi que j'ai décidé d'intervenir au nom du parti.
Le 26 décembre 1999, j'ai donc demandé à ma fille ANNICK qui était à Africa n°1 de prendre contact avec ses amis de la radio et de la télévision pour une déclaration que j'allais faire. J'avais préparé le texte que j'ai pu lire à M. Edjampan TIEMELE qui m'a conseillé de mettre "Chef de l'Etat" au lieu de Président de la République, puisque Guéi n'avait pas été élu de façon démocratique…
La presse est donc arrivée mais dans une camionnette et à ma grande surprise, avec des soldats très excités à bord, munis de mitraillettes. Ils ont commencé par fouiller ma maison de fond en comble et se sont ensuite mis en position de combat. Lorsque je me suis assis pour lire la déclaration, un des militaires s'est arrêté derrière moi, et un autre devant, tous deux avec leurs armes pointées sur moi au cas où ma déclaration ne serait pas de leur goût. Je serais abattu systématiquement ! Vous comprenez que ce n'était point facile, avec mon épouse et mes enfants qui étaient sommés par les militaires de s'asseoir et de me regarder !
C'est dans ces conditions que j'ai fait la déclaration au nom du parti en présence de mon condisciple Guillaume ZABI SOKO qui peut en témoigner. Cette déclaration a fait le tour du monde.
Dès que la déclaration a été faite, le ministre Jean Konan BANNY qui m'a toujours honoré de son affection, a été le premier à m'appeler, pour me féliciter, tout en regrettant que nous n'ayons pas pu nous concerter auparavant.
C'est cette déclaration qui a permis, je dois le dire, de redonner courage et espoir aux militants et c'est ainsi que dès le lendemain, par petits groupes, les responsables et les militants ont commencé à fréquenter la maison du Parti. Il faut indiquer que des militants, et non des moindres, avaient commencé à débarrasser les salles de réunions de la maison du parti de toutes les photos du président BEDIE !
Les militants ont donc recommencé à fréquenter la maison du Parti, la peur au ventre. Ils venaient parce qu'ils savaient qu'il y avait désormais un semblant d'autorité, de tête, et, il faut le dire ils venaient surtout aux nouvelles. Le " Comité de Crise " se présentait comme l'interlocuteur du Général GUEI et du CNSP et il faut reconnaître l'autorité du ministre Jean KONAN BANNY, ancien ministre de la Défense, qui a eu souvent à intervenir auprès des militaires qui régulièrement encerclaient la maison du Parti sous n'importe quel prétexte.
C'est au cours de l'une des réunions de ce " Comité de crise " que, suite à une déclaration que le Président BEDIE avait faite et qui n'avait pas été du goût du Général GUEI, que la question a été posée de savoir quelle attitude adopter vis-à-vis du Président en exil, afin de protéger les militants restés sur place au pays. Il y avait deux positions.
Un premier groupe voulait que l'on suspende le Président BEDIE et dès lors, de considérer qu'il n'intervenait plus au nom du Parti. La conséquence de cette position est que le Président n'était plus considéré comme un membre actif du Parti.
Le deuxième groupe, dont je faisais partie, estimait qu'il fallait utiliser le procédé " du congé administratif ". On sait que dans l'Administration, on peut mettre un fonctionnaire en congé, pour une période plus ou moins longue, avec la possibilité pour celui-ci de reprendre son poste à son retour.
C'est cette dernière position qui a prévalu et j'ai moi-même participé à la rédaction du document qui été lu par le ministre Jean KONAN BANNY, au nom de tous. Il s'agit donc d'une décision collective, en tout cas des participants à cette rencontre qui s'est tenue dans le bureau qu'occupe aujourd'hui le Secrétaire général du PDCI-RDA.
Du reste, le ministre Jean KONAN BANNY s'est déjà largement expliqué sur ce point.
Il est facile aujourd'hui de jeter la pierre, mais l'honnêteté veut que l'on reconnaisse que pendant la transition du CNSP et, surtout au tout début, quand il n'y avait ni Président, ni Secrétaire général du Parti, il fallait trouver une formule qui permettait de redonner vie au PDCI et courage à ses militants. C'est ce qu'a fait le " Comité de crise. "
Les positions des uns et des autres ont fait grand bruit. Quelle est l'ambiance aujourd'hui, pour ne pas dire, comment le Président BEDIE a réussi à fédérer tous ces bouillonnements ?
Vous devez savoir que le Président BEDIE est un homme d'Etat, un homme de grande réflexion qui prend son temps avant de décider. Cela donne l'impression d'un manque de vivacité que certains peuvent traduire par un manque d'intérêt. Or, tout cela est loin de la vérité. On peut, dans un premier temps ne pas approuver ou être d'accord avec les positions qu'il prend, mais avec le temps, on se rend compte que c'est bien lui qui avait raison. C'est le fruit d'une longue expérience.
Dès qu'il y a eu le coup d'Etat, beaucoup ont pensé que leur heure avait sonné. On les connaît. On a également lu leurs déclarations, leurs prises de position. Mais, vous savez que dès que vous vous soumettez à la sanction des urnes, les choses deviennent différentes. Au 11ème Congrès du parti, les militants ont, par un véritable plébiscite, donné les coudées franches au Président BEDIE en l'installant confortablement dans le fauteuil de Président du Parti, avec un mandat bien précis. Ce mandat a été renouvelé lors de la Convention d'investiture.
Certes, on ne peut pas supprimer d'un trait de plume les velléités, mais devant la position de la majorité des militants ou de leurs représentants, il est certain que ces velléités ne pouvaient qu'être rangées, ne serait-ce que temporairement, au placard.
A cela, je crois qu'il faut ajouter la connaissance des hommes. Les contacts permanents avec les uns et les autres, souvent chez lui à DAOUKRO, ont permis de dénouer maints problèmes qui ont pu se poser ici et là.
Ainsi, aussi bien à travers des méthodes , disons réglementaires, qu'à travers des contacts directs, les " bouillonnements" comme vous dites, ont pu se résorber et aujourd'hui, le Président BEDIE apparaît comme l'homme de la situation, l'homme qu'il faut, à la place qu'il faut :un homme qui a traversé toutes les échelles de l'administration publique de son pays, qui a une vaste expérience de la gestion centrale et décentralisée, qui a eu les contacts les plus divers dans le monde entier, tout cela reposant sur une solide culture de droit et de finance. Il y a aujourd'hui, dans nos rangs, peu de militants qui disposent d'autant d'atouts.
Dans le secret des Dieux, vous confirmez donc , malgré les écrits de certains journaux, que pour le moment, Henri KONAN BEDIE est celui dont l'aura, non seulement a réussi à ressouder le parti, mais peut mener le PDCI à la victoire ?
Je crois avoir déjà répondu à la question. Prenez nous tous, nous les enfants de Félix HOUPHOUET-BOIGNY, militant dans le Parti qu'il a créé et dites-moi qui vous voyez pour le moment. Il n'y en pas d'autre. C'est la raison pour laquelle, je crois et milite pour qu'il nous mène à la victoire lorsque des élections ouvertes, justes et transparentes seront organisées !
Vous êtes dans une dynamique du PDCI et la reconquête du pouvoir. Quels sont vos atouts ?
Nous avons plusieurs atouts. Le plus important de nos atouts est le candidat que nous allons présenter. Malgré les écrits fumeux et souvent ne relevant que de la méchanceté gratuite, le Président BEDIE reste l'homme capable de remettre la Côte d'Ivoire sur les rails .BEDIE n'a pas de sang sur les mains. BEDIE a de la compassion, ce n'est pas le cas de tout le monde. BEDIE a de l'expérience, l'expérience du travail, l'expérience de la vie. Enfin, BEDIE peut se suffire à lui-même. Ce n'est pas le cas de beaucoup qui ne vivent, comme moi, que de leur salaire de fonctionnaire ou de leur retraite et quand il y a un retard quelconque, ils se retrouvent dans des difficultés.
Alors, comment vivez-vous la crise qui frappe le pays ?
Je la vis mal, très mal même. A la vérité, mon mal a commencé avec le coup d'Etat du 24 décembre 1999. Je me suis toujours demandé, alors que nous étions à dix mois des élections générales de 2000, pourquoi les soi-disant " jeunes gens " du Général GUEI et leurs commanditaires n'ont pas pu, puisqu'ils se déclarent démocrates, attendre ces consultations pour chasser BEDIE et le PDCI du pouvoir. C'est donc qu'il y a un double langage, car on professe quelque chose et on fait le contraire ! Du reste, c'est bien ce que nous vivons depuis la crise.
Mon mal a empiré depuis le 19 septembre 2002. Depuis cette date, je n'ai pas pu mettre pied dans mon village qui est situé en plein cœur de la zone sous contrôle MPCI ou Forces nouvelles.
Alors, j'ai mal, oui, j'ai mal !
Vous êtes politologue de formation, à quel niveau situez-vous la survenance de la crise ?
Au forum de réconciliation présidé par l'ancien Premier ministre Seydou DIARRA, le Chef de l'Etat, Laurent GBAGBO a expliqué que le coup d'Etat était le résultat du mauvais partage de l'héritage du Président Félix HOUPHOUET-BOIGNY. Je crois qu'on peut indiquer que la crise est survenue par suite du mauvais partage des retombées du coup d'Etat de 1999, par ceux qui l'ont commandité et l'ont réalisé. Il suffit pour cela de relire les documents élaborés sur le site Internet du MPCI, installé en Californie et dans le Missouri aux USA.
Je pense honnêtement que depuis le 10ème Congrès du PDCI, qui s'est tenu en octobre 1996, le PDCI s'est organisé de telle sorte qu'il ne pouvait être battu dans aucune élection propre en Côte d'Ivoire. Cela a fait peur, car les adversaires du PDCI ne savaient plus de quelle manière ils pourraient accéder au pouvoir. Ils ont donc choisi le raccourci du coup d'Etat pour se retrouver au pouvoir. Examinez un peu tous les moyens mis en œuvre pour écarter, en 2000, tous les candidats du PDCI à la présidentielle !
Votre regard sur la façon dont la crise est gérée.
On ne peut pas dire que la crise soit bien gérée ! Cela fait cinq longues années que ça dure et rappelle le petit ouvrage de Lénine, " Un pas en avant, deux pas en arrière "
A tout le moins, on fait du sur-place si on ne recule pas !
Tenez, dès le 22 septembre 2002, c'est-à-dire trois jours exactement après les évènements, le Président BEDIE organisait dans sa résidence une réunion de crise au cours de laquelle il proposait à M. Laurent GBAGBO et au FPI de discuter avec ceux qu'on appelait alors les rebelles.
La proposition a été rejetée du revers de la main, avec l'air de dire, si vous êtes si malin, si expérimenté, pourquoi avez-vous été chassé du pouvoir ? Aujourd'hui, on nous parle de dialogue inter ivoirien, mais dans un territoire étranger, même s'il est très proche de nous !
L'opposition de par son " indolence ", de par sa " panne de stratégies ", comme l'affirment certains sachants, dont ANAKY KOBENA, président du MFA, n'a-t-elle pas contribué à faire perdurer la crise ?
On peut tout dire de l'opposition. C'est même normal qu'il en soit ainsi. Je voudrais toutefois faire remarquer que c'est une bien lourde responsabilité de mener des troupes. Il faut, me semble-t-il, tenir compte de l'engagement, du moral de ces troupes tout autant que de l'adversaire en face.
Il y a d'un côté, une opposition démunie, désargentée et de l'autre un pouvoir qu'il ne faut pas craindre de qualifier de dictatorial qui monopolise les instruments de violence d'Etat et qui, pire, a muselé les média d'Etat. Dans ces conditions, comment voulez-vous avoir accès à vos militants ?
L'exemple le plus frappant était la marche pacifique qui devait être organisée en mars 2004. Avant même qu'elle n'ait commencé, toutes les rues étaient barrées par des militaires et des miliciens. Les militants qui ont voulu braver ces agents se sont retrouvés dans des tombes sans que l'heure du rappel à Dieu ait sonné !
C'est quand même une responsabilité d'envoyer mourir des gens face à des assoiffés de pouvoir.
La responsabilité de cette crise repose essentiellement sur ceux qui nous dirigent et nulle part ailleurs.
Je peux dire toutefois, et c'est ma conviction profonde, que cela changera, car il n'y a pas de situation qui n'ait pas de fin ! Regardons l'histoire. Il y a eu la guerre de Cent ans, la guerre d'indépendance des Etats-Unis et bien des dictatures sont tombées, souvent par le fait de ceux-là mêmes dont on se servait comme des bourreaux !
Mais, que l'on me comprenne bien. Je ne suggère nullement de rester les bras croisés. Au contraire, l'opposition doit savoir qu'elle seule a la solution à sa libération, par l'élaboration de stratégies qu'elle peut mettre en œuvre. Et je sais que beaucoup a été fait dans ce sens et cela doit se poursuivre !
Ne craignez-vous pas un nouveau blocage après OUAGADOUGOU III ?
Voyez-vous, il y a un mal profond qui ronge les protagonistes de cette crise. Ils souffrent de ce que les politologues américains qualifient de " credibility gap ", pour dire qu'ils ne sont pas crédibles et cela de leur propre fait. Comptez un tout petit peu le nombre de documents signés ! Et combien sont-ils qui ont connu une exécution telle que voulue par eux-mêmes ?
On ne peut donc jurer de rien, dans une situation comme celle-là. Tout est possible. J'ai une conviction. Je crois que le chef de l'Etat n'acceptera d'organiser des élections que lorsqu'il sera certain de les gagner.
Et si, on ne le souhaite pas, blocage il y avait ?
Il faut s'y attendre de toutes les manières pour ne pas être surpris. Nous, je veux dire l'opposition et ceux qui souhaitent un changement dans le pays, devons continuer de rechercher les moyens, les stratégies et mener des actions, même si leur portée paraît insignifiante au départ.
Pour vous, qui côtoyez le Président BEDIE au quotidien, pour le PDCI, quel est le minimum pour aller aux élections ?
Je ne comprends pas bien la question.
A votre convenance, docteur...
D’accord! S'agit-il d'un minimum de moyens financiers ? Si tel est le cas, je n'en ai aucune idée, mais je sais qu'une élection ne peut s'envisager sans argent.
Je sais par contre que la foi dans ce qu'il entreprend est une donnée essentielle et que le Président BEDIE est animé de cette foi.
Par ailleurs, je sais qu'il dispose d'un parti, le PDCI-RDA qui est une véritable machine qui lui est entièrement dévouée.
Enfin, le Président sait qu'il peut compter sur les jeunes, les femmes et les cadres qui savent que BEDIE constitue la planche de salut.
Je crois et je sais que ce minimum lui est garanti et qu'il peut aller aux élections qui vont arriver tôt ou tard, assuré de tout ce que je viens d'indiquer.
Est-il vrai qu'au PDCI, votre gouvernement est prêt, tellement vous êtes sûr de la victoire de BEDIE ?
Dans le système politique anglais, chaque parti, notamment les plus importants, créent ce que l'on appelle des gouvernements de l'ombre, traduction littérale de " shadow governement ".Il s'agit essentiellement de personnalités qui se préparent à entrer au gouvernement dès que leur formation politique obtient le pouvoir .
Il faut savoir toutefois que le Président BEDIE dans le cadre de la mise sur pied du Secrétariat général, a nommé des responsables dans des Secrétariats nationaux, qui sont des équipes chargées de préparer des dossiers sur toutes les grandes questions auxquelles fait face le gouvernement.
On peut imaginer que si ces équipes font le travail qui leur est demandé, un futur membre du gouvernement puisse en sortir.
Pour revenir à la question, je dois vous dire que tout parti politique qui se respecte, a un gouvernement de l'ombre.
Le PDCI-RDA est le deuxième plus grand parti politique en Afrique après l'ANC de Nelson MANDELA. C'est un parti organisé et le Président BEDIE qui le préside a des noms de militants sur qui il peut compter à tout moment. Il ne peut pas en être autrement.
Son souci aujourd'hui, ce sont les élections, elles doivent être justes et transparentes, car nous sommes prêts.
Si vous demandez tout de suite au Président BEDIE de constituer un gouvernement, il vous le sortira, car le PDI-RDA dispose d'un vivier de cadres, nombreux et compétents, prêts à se mettre au travail pour remettre la Côte d'Ivoire sur les rails.
Des vœux, en cette fin d'année ?
J'ai formulé mes vœux de bonne et heureuse année au début de cette rencontre. Je les renouvelle.
Au moment où nous mettons fin à cet entretien, je me mets à rêver à ce passé pas si lointain où, parce que nous étions en paix, nous étions libres, qu'il n'y avait pas de barrages routiers, que nos maisons et nos biens étaient en sécurité, il m'était possible de prendre l'autoroute du Nord, de parcourir pendant la nuit, les six cent à sept cent kilomètres qui séparent Abidjan de Fodio, mon village et de Boundiali, la ville dont j'ai été le maire pendant quinze ans et , après avoir accompli ce pourquoi j'avais effectué le voyage, de revenir aussi simplement à Abidjan, pour y reprendre mes activités ! Cette période est-elle partie pour de bon !?
Le grand homme a dit : " Le bonheur, on ne l'apprécie que lorsque l'on l'a perdu " ! Il avait tellement raison.
Que Dieu fasse que ce bonheur revienne. Que la paix revienne, que la sécurité revienne et que la fierté, oui, la fierté toute simple d'être Ivoirien revienne.
C'est mon vœu le plus intime pour chaque Ivoirien et chaque Ivoirienne et pour tous ceux qui ont accepté de vivre avec nous.
Bonne et heureuse année 2008 !